samedi, novembre 04, 2006

Et la Couleur fut

S'y rendre pour la forme et revenir enchanté.

Si je n'y allais pas, franchement, la honte quoi ! Toute l'année ils nous ont bassinés avé' l'exposition de la décennie, celle qu'il ne fallait absolument pas manquer ! Alors parce que j'ai pu avoir un billet (merci Céline !), je m'y suis rendu le dernier jour. Avec l'espoir de pouvoir circuler tranquillement mais que nenni ! La billeterie, jointe par téléphone nous impose un horaire alors un rendez-vous est convenu : devant le musée à 16h30 en ce beau jour de septembre... Les formalités, nous voilà débarasser de nos effets personnels et on peut enfin pénétrer dans l'antre du Musée Granet.

Une fois le détecteur de métaux franchi et après avoir compris le cheminement que nous devions emprunter nous nous retrouvons dans une salle de taille moyenne eclairée d'une baie vitrée dans son angle nord-ouest. Outre les éclairages artificiels, cette percée de lumière embaume la pièce d'une aura particulière. Les cadres exposés se trouvent baignés dans une ambiance aérée toute étherienne. Ces cadres de bois massifs tranchent avec le blanc clinique des murs. Les oeuvres du rez-de-chaussée sont l'exposition permanente et le musée nous sert ici sur un plateau d'argent le savoir-faire des écoles flamande, hollandaise ou italienne. Qu'on me pardonne mais seul ici Pierre de Cortone a e les faveurs de ma pauvre mémoire embuée par ce tourbillon de couleurs.

Les deux salles suivantes qui nous conduisent à un modeste escalier, conservent des oeuvres au goût de Renaissance et laissent derrière elles le moyen-âge. Des personnages nous fixent de leurs regards centenaires et arborent fraises et autres vertugadins en tambour des plus raffinés.

Parcourir un musée ou comment traverser les âges sans effort.

L'escalier se pare de trois oeuvres transitoires et pas des moindres. Elles trônent fièrement et nous toisent de leur signature ô combien fameuse et dont elles peuvent être fières. Trois toiles de M. Ingres qui s'offrent comme pour s'excuser de nous avoir fait attendre et qui précèdent directement le pourquoi de notre venue... Le portrait de M. Granet, Jupiter et Thétis et une aquarelle qui laissent pantois tant la technique est maîtrisée et les contours si léchés. Si la direction avait pour but, en les suspendant ici-même, de nous accomoder au génie, c'est réussi... Mais si l'amorce de l'exposition est envoûtante, la suite n'en sera que plus fascinante et enchanteresse...

Pour être tout à fait franc, la disposition exacte des oeuvres et leur répartition dans les salles, je les ai un peu oubliées mais qu'importe ! L'essence même d'une exposition ce n'est point la composition spatiale (même si monsieur le conservateur du musée a dû se faire un tas de cheveux blancs), mais bien l'effet que les oeuvres provoquent sur le spectateur.

En revanche ce qui m'a frappé, c'est cette soudaine profusion de couleurs dans un endroit si neutre. C'est le propre d'un musée finalement : s'effacer pour laisser la part belle à l'oeuvre d'art...

Entrons dans le vif du sujet, la raison de notre venue, le coeur même du musée pendant ces quelques mois. Monsieur Paul Cézanne fait se déplacer les foules ! Une exposition pour commémorer le centenaire de sa mort. Quelle belle occasion que la mort d'un artiste pour montrer au public ce qui a fait de lui l'unique ! On aime ou on aime pas mais il faut reconnaître qu'il n'était pas que peintre mais bien presti... presdi... gi... ta...teur, enfin un magicien quoi. Un magicien de la couleur.

N'est-il pas le premier à ressentir cette couleur en tant que telle et sans se soucier de la forme. Oui, c'est un précurseur et les artistes d'avant-garde du XXe siècle reconnaîtront en lui leur maître à penser... et à voir. Ses croûtes lui vaudront de méchants mots, des menaces de mort et certains n'hésiteront pas à glisser les critiques véhémentes des journaux parisiens sous sa propre porte. Ces mêmes voisins retourneront leur veste à la fin de la vie du peintre quand celui-ci se verra enfin reconnu par ceux qui font l'art, là-haut dans la capitale.

Cette exposition est un vrai plaisir du début à la fin. Tout y est, ses brouillons, ses études, ses croquis, ses aquarelles, ses huiles tout ce qui a fait sa carrière. Des oeuvres venues des quatre coins de la planètes : Washington, New-York, Munich, Denver, Malibu ou encore St Petersbourg... Comment retranscrire avec des mots ce que ses toiles émanent. Au prime abord dubitatif, voire réticent j'ai hésité à me rendre à cette exposition, Cézanne me laissant parfois perplexe. Mais tout est si clair et limpide quand on se retrouve devant un paysage ou un portrait cézannien. Tout est là : les intentions, les émotions, les amours, les angoisses... Les crevasses, craquelures ou rehauts de couleurs entament un dialogue avec le visiteur et elles ont tant à dire...

Cézanne, à travers sa peinture, a fait résonner le chant des cigales dans le monde entier. Ce dernier a pu découvrir cette terre mauvre et ocre si particulière qui ne ressemble à rien d'autre. Cent ans plus tard, le XXIe et Aix siècle accueillent en leur sein plus de 400 000 visiteurs en quelques semaines. Seul bémol, des toiles fameuses descendues de leur cadre ont du retourner chez leur propriétaire pour d'obscures raisons.

Je me suis délecté de Cézanne comme on déguste un pot de Nutella : Tout doucement, on apprécie chaque cuillère et quand on y va petit à petit, l'écoeurement est impossible !

Cézanne Peint

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Je confirme le lien fonctionne! :D See you...

Anonyme a dit…

"La perfection d'une oeuvre d'art ne se mesure pas à la perfection du Beau, mais à la perfection de l'imitation de la nature. Or, s'il est vrai que la prefection des choses consiste en substance dans la parfaite réalisation de leur objet, quel est donc l'objet des beaux-arts ?" in Zibaldone - Giacomo Léopardi.